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Cabinet de desseins

LES COLLAGES IDÉOLOGIQUES

Une image, très souvent prélevé de la presse quotidienne, un texte et un mise en page graphique, parfois sur de papiers journaux peints, sont souvent les trois éléments qui composent les collages.
La relation entre les trois éléments est faite de par leur proximité temporelle. Le texte, issu de lectures diverses, est mis en rapport avec l’image et la mise en page du support.
Il n’y a pas de recherche précise d’un sens plus construit, plus réfléchi, précédant la mise en forme donné par le collage.
Partant du principe que toute relation image – texte génère du sens, même le plus abscons, l’idée est d’essayer de donner le plus d’ouverture possible à cette relation sémantique.
Les sources de textes sont délibérément cachées pour ne pas faire “autorité” de citation. Les pages de journal utilisées renvoient au formats usités dans la presse, les couleurs appliquées en aplats. La discontinuité propre du collage permet aussi de mettre en avant la faculté des textes, des mots, à mettre en absence les choses, les faits, et par extension, les images. Cette investissement du collage, de par sa rapidité de réalisation, sa transparence du geste et son immédiateté, est assimilée à une pratique du dessin.

Au fil du temps*, la production de ces collages s’est apparenté de plus en plus à un journal de pensée. Un journal de tout ce qui se trouverait sous-jacent à ma pratique d’artiste, de peintre réfléchissant à certaines abstractions de la peinture.

Il est fort probable, que les raisons qui m’ont poussé à refuser l’image dans la peinture, à réaliser des peintures emmurées, ou à réfléchir à des dispositifs, soient plus perceptibles dans l’ensemble hétérogène de ces travaux. Et alors, la polysémie dérivé du collage et de son accumulation, deviendrait une image mentale de ce négatif de la peinture, de la face caché de son travail.

* Ce travail, commencé en 1995 fait partie d’une pièce en perpétuel devenir appelée Le Cabinet de Desseins.
Les Collages Idéologiques (et les Carnets Photos) constituent peut-être sa partie la plus intime.

2006Berta m’invite à participer dans l’exposition rétrospective qu’elle et le commissaire David Barro préparent pour le musée CGAC. Le projet est un parcours transversal sur 30 ans de travail, incluant une partie sur le mode de l’essai, et il devait se répartir sur le CGAC et la Fondation Luis Seoane en s’accompagnant d’interventions d’artistes complices et proches de Berta. Finalement le projet se réduit pour de raisons politiques et se replie sur le CGAC où je reste seul invité. Ma réponse à l’invitation de collaborer se concrétise sur un collage mural que nous décidons de placer dans la partie essai situé dans le couloir qui communique entre les salles d’exposition. Le couloir est étroit et long, contrainte finalement assez intéressante puisque elle invite à se déplacer. Je choisis de me situer vers le milieu, comme une coupure temporelle, et les plans colorés se structurent avec et contre cette horizontalité fuyante. L’image est répétée, suspendue, elle bégaie comme quand on travaille, elle demande un peu de temps pour la lire et n’est pas donnée comme une évidence. En cherchant pour le texte je pensais à la part de mélancolie qu’accompagne toute rétrospective, tout introspection sur le passé, à ceux qui nous ont accompagné et sont aujourd’hui disparus. Un peu comme si on pensait aux promesses d’une enfance supposée qui ne seraient pas tenues, qui ne peuvent pas, n’ont pas pu être tenues, et qui me semblent avec l’expérience être des vrais moteurs d’un travail artistique. Mais je réfléchissais également au fait que nous les interrogeons sans cesse, que nous ne sommes jamais les mêmes et que nous changeons avec la vie et le temps, à la beauté de ceci qui nous permet de sentir et exprimer cette mélancolie.